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Comment les Emirats de Ben Zayed ont roulé dans la farine l'Arabie de Ben Salmane

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Le prince héritier des Emirats, Mohamamd Ben Zayed (G) et le prince héritier saoudien, Mohammad Ben Salmane (D). ©AFP

Depuis le déclenchement de la guerre au Yémen,  les analystes ne cessent d'utiliser le terme "coalition" pour évoquer l'action guerrière menée par l'Arabie et les Émirats, sous le commandement USA/OTAN/Israël. Mais où en sont Saoudiens et Emiratis de leur alliance, près de quatre après le début d'une guerre qui ressemble en tout à un gigantesque fiasco? Le site d’information Middle East Eye tente y porter une réponse :

« Depuis que la coalition saoudienne a lancé sa guerre au Yémen, les Émirats arabes unis ont été un acteur clé sur le champ de bataille. Pourtant, alors que Riyad prétendait tenter de ramener le président démissionnaire Abd Rabbo Mansour Hadi au pouvoir et d’écraser la résistance des forces armées et des Comités populaires du Yémen (Ansarallah), Abu Dhabi, lui, s’est davantage concentré sur les régions méridionales du pays, à savoir, sur la formation des forces yéménites fidèles à Abou Dhabi pour y garantir ses propres ambitions géopolitiques ».

Les EAU travaillent depuis 2015 à la séparation du sud du Yémen en jouant la carte de tribalisme, son objectif étant d'ériger au port stratégique d'Aden un "État à la solde", propre à assurer la sécurité maritime de l'empire insulaire au quel rêvent les Emirats. La présence de plus en plus prononcé d'Abou Dhabi à Djibouti, en Ethiopie et en Érythrée s'inscrit d'ailleurs dans ce même sens. 

Le site fait allusion ensuite aux arguments invoqués par les EAU pour justifier leur présence au Yémen où ils tentent surtout de se poser comme un facteur de stabilité. Les Emiratis exposent en toute hypocrisie leurs [soi-disant] aides humanitaires au Yémen tout en écrasant les civils sous leurs bombes, et rejettent à titre de « fausses nouvelles »  les rapports concordants sur leur équipée militaire sanglante au Yémen. A vrai dire, ils agissent dans l'ombre de Riyad, croyant pouvoir se mettre à l'abri. Mais les Yéménites ne sont pas dupes. D'où le raid aux drones lancé il y a quelques jours contre l'aéroport d'Abou Dhabi, raid qui a choqué les Emiratis et qu'ils ont tout fait pour dissimuler. 

Middle East Eye fait allusion ensuite aux enquêtes de quelques groupes de défense des droits de l’homme, levant le voile sur des cas de torture et d'autres abus dans les prisons soutenues par les EAU dans le sud du Yémen,

en signalant :

« Associated Press a par ailleurs rapporté, le mois dernier, le recourt aux agressions sexuelles sur des détenus qui n'appartiennent pas forcément aux groupes houthis. Amnesty International dénonce aussi la "disparition" des centaines des pro-Hadi dans les prisons. Pour les EAU, c’est un moyen d’éliminer l’opposition à sa présence dans le sud ; mais pour les observateurs internationaux, tout cela prouve que les ambitions régionales des Émiratis dépassent l’humanitaire.

Les Yéménites ne peuvent pas non plus ignorer le soutien d’Abou Dhabi aux sécessionnistes du Sud et ses efforts censés enflammer les divergences tribales au Yémen. En janvier, les indépendantistes au sud se sont affrontés aux forces fidèles à l’ancien président démissionnaire Hadi, à Aden.

La rivalité Émirats/Arabie saoudite

Selon le site web londonien, le soutien des EAU pour l’indépendance du Sud n’a pas vraiment favorisé l’unité, vu qu’Abou Dhabi a soutenu différents groupes. Tout ceci renvoie aux nettes dissensions qui déchirent le soi-disant duo saoudo-émirati :  Riyad soutient les Frères musulmans de Yémen tandis que les EAU s’opposent à eux, se tournant davantage vers les groupes proches d’al-Qaïda en péninsule Arabique. Le schéma qui se met désormais en place au Yémen est fort complexe : plutôt que combattre les Houthis, Riyad est amené à contrer la gourmandise géostratégique des Emirats qui selon toute vraisemblance bute contre la résistance d'Ansarallah.

Riyad est tombé dans le piège des Emirats qui de par leurs erreurs de calcule et leur gaucherie, poussent à ce que les Yéménites, y compris les pro-Hadi s'unissent autour d'Ansarallah. A Hudaydah, une bataille a été lancée il y a deux mois à l'instigation d'Abou Dhabi,  bataille que la coalition a perdue, et ce, en dépit du soutien occidental et israélien. Cette bataille, les Emirats l'a cherchée pour s'emparer rallonger leur liste d'îles yéménites occupées. Or à Hudaydah, toutes les parties ont été surprises de voir Ansarallah se comporter en un véritable "Etat" : les tribus ont été mobilisés et de nouvelles capacités de combat des Houthis ont manifesté. Un morcellement du Yémen que cherchent à provoquer les Emirats, rien que pour s'emparer des îles yéménites, n'iraient pas loin : l'offensive contre Hudaydah a tourné à l'avantage des Houthis qui se posent désormais en acteur incontournable de la guerre, acteur que l'Occident ne peut plus ignorer. Pour le reste, Riyad continue sa descente en enfer dans une guerre qui voit ses propres "amis yéménites", se dissocier de sa cause : on accuse d'ors et déjà Riyad d'avoir traité Hadi, son pion, comme il a traité le PM libanais Hariri. Les tensions s'amplifient dans le sud. Le volcan sur quoi se tiennent maladroitement Riyad et Abou Dhabi, risque à tout moment d'entrer en éruption. 

 

 

 

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SOURCE: FRENCH PRESS TV